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PORTRAITS HISTORIQUES ET LITTÉRAIRES.

chie dans sa sincérité. Des souverains pontifes tels qu’Alexandre VI et Jules II étaient pour elle des adversaires plus dangereux que Luther et Calvin. Le plus grand nombre échangea ses vieilles croyances pour des superstitions nouvelles ; mais à l’école des philosophes sceptiques de l’Italie se forma une petite secte de libres penseurs, qui, armés de la terrible raillerie gauloise, devait achever de porter le désordre dans les esprits.

Des rapports que la guerre établit entre deux peuples il résulte d’ordinaire un échange de vices plutôt qu’un échange de vertus ; chacun imite le mal plus facilement que le bien. Cependant, malgré les influences étrangères, le caractère national se conserve et reparaît toujours sous l’affublement d’emprunt dont il se déguise par caprice ou par accident. Nos politiques avaient beau étudier Machiavel et chercher à pratiquer les leçons qu’il donne dans le Prince, le fruit d’une semaine de dissimulation était perdu par un instant d’étourderie. Patience et prudence, passion, haine et ruse, ces vertus et ces vices italiens n’étaient pas à notre usage. Un franc Picard, un Parisien, après avoir repassé les Apennins et les Alpes, rapportait de l’acqua tofana et des stylets de verre. Même, blessé par un quoli-