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BRANTHÔME.

Les relations, fréquentes depuis le commencement du siècle, entre la France et l’Italie, avaient eu aussi une funeste influence sur les mœurs. On dit que la renommée des vins d’Italie détermina nos ancêtres les Gaulois, grands ivrognes, à passer les monts. Pour les Français du xvie siècle l’Italie avait bien d’autres attractions. Les soldats de Charles VIII, de Louis XII et de François Ier, arrivant dans les plaines qu’arrose le Pô, ne furent pas sans doute moins délicieusement surpris que ceux de Brennus. Ils y trouvèrent toutes les séductions que la nature, les arts, une civilisation raffinée, pouvaient offrir à des hommes ardents à tous les plaisirs et qui croyaient les rencontrer pour la première fois. Une langue facile, dont les nombreux dialectes se confondent par une transition presque insensible avec ceux de nos provinces méridionales, favorisait les rapports des conquérants avec les gens du pays. L’Italie donna la mode ; les gentilshommes de Touraine ou de Normandie portaient des toques à la guelfe ou à la gibeline, revêtaient des armures de Milan, montaient des chevaux du Règne ou de la Polesine ; ils voulaient avoir des loges dans leurs châteaux du Nord, au risque de périr de froid. Jusque-là le mal n’était