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BRANTHÔME.

prévoir que la guerre civile allait éclater. Élevé catholiquement, bien qu’assez peu scrupuleux, abbé d’ailleurs, de plus attaché à la maison de Guise, Branthôme ne pouvait hésiter sur le choix d’un drapeau. Il accompagnait le duc François dans une escarmouche assez vive sous les murs de Paris, en 1562, puis aux siéges de Bourges, de Blois et de Rouen. Il assista à la bataille de Dreux, sur laquelle il fournit des détails curieux et vrais, et, grâce à la privauté dont l’honorait le duc, il fut du petit nombre des gentilshommes admis, le soir de la bataille, à voir le prince de Condé, prisonnier, se chauffant au coin de la cheminée et se disposant à partager le lit de son vainqueur. Dans toutes ces occasions Branthôme se conduisit en brave soldat, suivant au feu le duc, mais sans témérité, portant à la tranchée un chapeau de fer couvert de feutre noir, pour que l’éclat du métal ne lui attirât pas d’arquebusades : précaution fort louable, et que je ne cite que comme une preuve de son bon sens, remarquable à une époque où beaucoup de jeunes extravagants croyaient le courage inséparable des folles bravades. Le duc de Guise portait la prudence beaucoup plus loin que Branthôme ; car, à Dreux, il donnait son cheval de bataille et son ar-