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PORTRAITS HISTORIOUES ET LITTÉRAIRES.

formerait un musée national de toutes les productions des arts et de l’industrie. Ce vœu ne devait être exaucé qu’après sa mort. Les chambres, avec un honorable empressement, votèrent des fonds pour l’acquisition de son cabinet et de l’hôtel de Cluny, et le ministre de l’intérieur voulut que le directeur de ce nouveau musée fût un fils de Du Sommerard, instruit par ses leçons et compagnon de ses voyages et de ses travaux archéologiques. — Tout en se consacrant à la réhabilitation du moyen âge, Du Sommerard n’était point insensible aux efforts de l’art contemporain. Il aimait les artistes, et était heureux de les encourager et de les soutenir à leurs débuts. Habile à découvrir le talent ignoré, il parvint souvent à le signaler à l’attention du public, si difficile à captiver. Un seul trait peindra cet excellent homme. Il avait acheté à un de nos meilleurs peintres, encore inconnu, un tableau auquel personne n’avait fait attention. Dans le cabinet de Du Sommerard, il fut remarqué. Un financier voulut l’avoir, parce qu’il le voyait chez un connaisseur, et offrit de le payer le double de ce qu’il avait coûté. Du Sommerard accepte le marché avec empressement, reçoit l’argent et court aussitôt le porter à l’artiste : « Gardez tout, lui dit-il ;