Page:Mérimée - Portraits historiques et littéraires (1874).djvu/216

Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
PORTRAITS HISTORIQUES ET LITTÉRAIRES.

lité, et lorsqu’il croyait avoir de bonnes raisons pour le faire, il avait le courage de louer un homme ou un livre, fussent-ils condamnés par les honnêtes gens. Cette impartialité dans la critique, ce goût de l’examen, et cette recherche du bien partout où il se trouve, sont rares aujourd’hui et méritent qu’on les remarque. Avec une modestie poussée peut-être jusqu’à la défiance de lui-même, M. Alexis de Valon est l’homme le plus indépendant que j’aie connu dans ses opinions des coteries politiques ou littéraires.

Recherché comme il l’était, et obligé de consacrer beaucoup de temps à ce qu’on appelle les devoirs du monde, on s’étonnait qu’il pût trouver le loisir de travailler ; mais il y avait dans cette nature calme et contenue une habitude d’observation constante. En lisant un livre, il formait son style ; en causant au milieu d’une soirée, il étudiait les hommes. Bien qu’il aimât avec passion tous les exercices de son âge, — et sa mort en est la triste preuve, — il donnait la préférence aux amusements de l’esprit, un peu abandonnés par notre société moderne. Il aimait les arts et en parlait bien. Il a fait de jolis vers, connus seulement d’un bien petit cercle d’amis, et il les improvisait avec