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PORTRAITS HISTORIQUES ET LITTÉRAIRES.

de méthode. Il les interrompit bientôt. Alors Paris lui offrait de trop nombreuses distractions. Déjà lié avec quelques personnages suspects au nouveau gouvernement, il se trouva bientôt associé à une foule de gais compagnons, frondeurs comme lui, royalistes ou républicains, que leur haine contre Napoléon unissait dans une opposition commune. M. Nodier ne connut jamais qu’un principe politique. « Le parti le plus juste, disait-il, c’est le parti des vaincus. » D’après cette maxime, qui trouvera peu d’approbateurs, il réglait sa conduite. D’abord il écrivit plusieurs articles dans le Citoyen français, seul journal qui protestât alors contre l’entraînement de servitude excité dans une nation guerrière par l’ivresse des armes et l’éblouissante fortune du premier consul. Il fit plus, il osa s’attaquer à la personne même du chef de l’État, à la toute-puissance du général victorieux. Une ode, intitulée la Napoléonne, circulant manuscrite, obtint un succès prodigieux, qu’elle dut autant aux sentiments d’un républicanisme fougueux qu’à l’énergie du poëte, accusant le grand homme d’aspirer à descendre. Bientôt, la satire s’enhardissant jusqu’à paraître imprimée, attira sur le libraire qui s’en était fait l’éditeur le courroux de l’autorité. Grâce à sa