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PORTRAITS HISTORIQUES ET LITTÉRAIRES.

en avait guère d’autres auxquels on pût avoir recours. Quelle ressource avait le faible contre le fort ? Puissance était un synonyme de tyrannie. Des lois, il y en avait dans des recueils écrits, mais qui avait le pouvoir ou la volonté de les faire exécuter ? Faut-il s’étonner que des hommes élevés au milieu des discordes civiles, habitués aux armes, et regardant le courage comme la seule vertu, ne confiassent qu’à leur épée le soin de leur honneur ou la réussite de leurs projets ?

La religion, qui s’allie aisément avec toutes les passions humaines, ne tempérait pas ces mœurs brutales. Les uns ne la faisaient consister que dans des pratiques faciles à observer, et trouvaient dans leur accomplissement une excuse et une suffisante compensation à tous leurs excès. Les autres, choqués de la puérilité de ces pratiques, les rejetaient avec mépris, et avaient simplifié leur croyance, mais ils n’en avaient pas plus d’égards pour la morale que l’on peut tirer des livres saints.

Je suis assez porté à croire que la masse de vices et de vertus a été la même à toutes les époques ; aussi, je ne pense pas que nous valions beaucoup mieux que nos pères, bien que nous n’assassinions