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L’INSPECTEUR GÉNÉRAL

Khlestakof.

Ah ! des vers, j’en sais beaucoup.

Maria.

Eh bien, dites-moi ceux que vous m’écrirez.

Khlestakof.

À quoi bon les dire, puisque je les sais bien sans cela ?

Maria.

J’aime tant les vers…

Khlestakof.

C’est que j’en sais tant de toutes sortes… Voulez-vous, tenez, que je vous écrive, par exemple :


Toi dont le désespoir ose accuser ton Dieu,
Homme…


Ou bien ceux-ci… C’est drôle, je ne me rappelle plus… Au reste, cela ne fait rien. Au lieu de cela, si je vous offrais mon cœur, qui, depuis que je vous ai vue… (Il approche sa chaise.) L’amour…

Maria.

L’amour !… Je ne sais pas ce que c’est que l’amour… Je ne comprends pas ce que c’est. (Elle éloigne sa chaise.)

Khlestakof.

Pourquoi éloignez-vous votre chaise ? Il est si agréable d’être assis l’un auprès de l’autre.

Maria, éloignant sa chaise.

Pourquoi, près ? On est aussi bien, loin.

Khlestakof, se rapprochant.

Pourquoi loin ? On est aussi bien, près,

Maria s’éloignant.

Pourquoi cela ?

Khlestakof, se rapprochant.

Vous croyez que nous sommes près ! Figurez-vous que nous sommes loin… Ah ! mademoiselle, que je serais