Page:Mérimée - Les deux héritages, suivi de L'inspecteur général, 1892.djvu/217

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
209
L’INSPECTEUR GÉNÉRAL.

recteur essaie de fumer, et tremble toujours.) Mais ce n’est pas le bon bout.

Le Recteur, jette son cigare effrayé, crache et s’agite avec inquiétude.

(À part.) Le diable emporte ! maudite timidité !

Khlestakof.

À ce que je vois, vous n’êtes pas amateur. Moi, je l’avoue, c’est mon faible. Ma foi, aussi, sous le rapport du beau sexe, je ne suis pas indifférent. Et vous ? Qu’est-ce que vous préférez, les brunes ou les blondes ? (Le recteur stupéfait, ne trouve pas un mot à dire.) Voyons, dites-nous franchement : êtes-vous pour les brunes ou pour les blondes ?

Le Recteur.

Je n’ose pas…

Khlestakof.

Non, non ! Expliquez-vous. Je tiens à savoir votre goût.

Le Recteur.

Je prendrai la liberté de vous faire observer… (À part.) Je ne sais ce que je dis. La tête me tourne.

Khlestakof.

Ah ! vous ne voulez rien dire. Allons, je parie qu’une petite brunette vous aura joué quelque tour de sa façon. Convenez-en. (Le recteur se tait.) Ah ! vous rougissez ! voyez-vous, voyez-vous ! Pourquoi donc ne parlez-vous pas ?

Le Recteur.

Je suis intimidé monsi… monsei… votre ex… (À part.) Maudite langue ! traîtresse de langue !

Khlestakof.

Vous êtes intimidé ? Eh bien ! En effet, il y a dans mes yeux quelque chose qui intimide. Ce que je sais bien, c’est qu’il n’y a pas une jeune personne qui soutienne mon regard ! Hein ?