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L’INSPECTEUR GÉNÉRAL

Bobtchinski.

Le même numéro, où l’année passée se sont battus ces officiers qui passaient

Le Gouverneur.

Et y a-t-il longtemps qu’il est là ?

Dobtchinski.

Environ deux semaines. Il est descendu chez Vassili Eghiptianine.

Le Gouverneur.

Deux semaines ! (À part.) Oh ! mes patrons ! ô mes petits saints ! Épargnez-moi, mes protecteurs ! Et la femme du sous-officier qu’on a fouettée pendant ce temps-là[1] ! Et les prisonniers qui n’ont pas eu leurs rations ! Et les cabarets dans les rues, et pas de balayage !… Miséricorde ! je suis perdu.

(Il se prend la tête à deux mains.)
L’Administrateur.

Eh bien, Anton Antonovitch, il faut aller en uniforme à l’hôtel.

Le Juge.

Non, non. D’abord, il faut lui détacher le prévôt, le clergé, les marchands. Savez-vous ce qu’il y a dans le livre de la vie de Jean Masson…

Le Gouverneur.

Non, non, laissez-moi faire. Allons, il y a des moments pénibles dans la vie ; cela passe, grâce au ciel. Pourvu que le bon Dieu ne nous abandonne pas ! (À Bobtchinski.) Vous dites que c’est un jeune homme ?

Bobtchinski.

Un jeune homme de vingt-trois à vingt-quatre ans, pas davantage.

  1. La femme d’un sous-officier est nécessairement une personne libre qui ne peut être soumise sans jugement à un châtiment corporel.