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l’autre, non sans un dépit secret. Il fit ensuite apporter du vin, et profita du moment où les gagnants buvaient à leurs succès passés et futurs, pour reprendre d’une main les cartes profanes, et les remplacer de l’autre par les bénites.

Quand la troisième partie fut commencée, Federigo, ne donnant plus aucune attention à son jeu, eut le loisir d’observer celui des autres, et le trouva déloyal. Cette découverte lui fit grand plaisir. Il pouvait dès lors vider en conscience les bourses de ses adversaires.

Sa ruine avait été l’ouvrage de leur fraude, non de leur bien-jouer ou de leur fortune : il pouvait donc concevoir une meilleure opinion de sa force relative, opinion justifiée par des succès antérieurs. L’estime de soi (car à quoi ne s’accroche-t-elle pas ? ), la certitude de la vengeance et celle du gain, sont trois sentiments