Page:Mérimée - Carmen.djvu/241

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Permettez-moi de vous présenter un de mes amis, et de vous demander pour lui une invitation à votre bal.

— Amène-le à mon bal, et tu me le présenteras là. As-tu été hier chez la princesse *** ?

— Assurément ; c’était délicieux ! On a dansé jusqu’à cinq heures. Mademoiselle Eletzki était à ravir.

— Ma foi, mon cher, tu n’es pas difficile. En fait de beauté, c’est sa grand’mère la princesse Daria Petrovna qu’il fallait voir ! Mais, dis donc, elle doit être bien vieille, la princesse Daria Petrovna ?

— Comment, vieille ! s’écria étourdiment Tomski, il y a sept ans qu’elle est morte !

La demoiselle de compagnie leva la tête et fit un signe au jeune officier. Il se rappela aussitôt que la consigne était de cacher à la comtesse la mort de ses contemporains. Il se mordit la langue ; mais d’ailleurs la comtesse garda le plus beau grand sang-froid en apprenant que sa vieille amie n’était plus de ce monde.

— Morte ? dit-elle ; tiens, je ne le savais pas. Nous avons été nommées ensemble demoiselles d’honneur et quand nous fûmes présentées, l’impératrice…

La vieille comtesse raconta pour la centième fois une anecdote de ses jeunes années. — Paul, dit-elle en fi-