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dire rieuse, prit une expression soudaine de tristesse :

— Elle m’a bien parlé de vous, dit-il, et jusqu’au dernier moment. Vous avez reçu sa bague, je le vois, et le livre qu’elle lisait encore le matin…

— Oui, Max, je vous en remercie. Vous m’annonciez, en m’envoyant ce triste présent, que vous quittiez Rome, mais vous ne me donniez pas votre adresse ; je ne savais où vous écrire. Pauvre amie ! mourir si loin de son pays ! Heureusement vous êtes accouru aussitôt… Vous êtes meilleur que vous ne voulez le paraître, Max… je vous connais bien.

— Ma tante me disait pendant sa maladie : « Quand je ne serai plus de ce monde, il n’y aura plus que madame de Piennes pour te gronder… (Et il ne put s’empêcher de sourire.) Tâche qu’elle ne te gronde pas trop souvent. » Vous le voyez, madame ; vous vous acquittez mal de vos fonctions.

— J’espère que j’aurai une sinécure maintenant. On me dit que vous êtes réformé, rangé, devenu tout à fait raisonnable ?

— Et vous ne vous trompez pas, madame ; j’ai promis à ma pauvre tante de devenir bon sujet, et…

— Vous tiendrez parole, j’en suis sûre !

— Je tâcherai. En voyage c’est plus facile qu’à Paris ;