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le commencement de l’année. Cela ne me promet rien de bon pour l’hiver prochain. Lorsque la chaleur que nous avons eue ne me met pas à l’abri des rhumes, que sera-ce lorsqu’il fera froid ?

Je crois qu’il faut se porter admirablement bien et avoir des nerfs d’une vigueur particulière pour que les événements qui se passent glissent sans trop affecter. Je n’ai pas besoin de vous dire ce que j’éprouve. Je suis de ceux qui croient que la chose ne pouvait pas s’éviter[1]. On aurait peut-être pu retarder l’explosion, mais il était impossible de la conjurer absolument. Ici, la guerre est plus populaire qu’elle ne l’a jamais été, même parmi les bourgeois. On est très-braillard, ce qui est mauvais assurément ; mais on s’enrôle et on donne de l’argent, ce qui est l’essentiel. Les militaires sont pleins de confiance ; mais, quand on pense que tout l’avenir est soumis au hasard d’un boulet ou d’une balle, il est difficile de partager cette confiance.

Au revoir, chère amie ; je suis déjà fatigué de vous avoir écrit ces deux petites pages. Je suis

  1. La guerre avec la Prusse.