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et le plus persistant du monde ; ce qui réduit au désespoir les jardiniers, qui ne peuvent faire pousser leurs choux. J’ai le regret de ne m’y guère porter mieux que s’il faisait mauvais temps. J’ai toujours, matin et soir, des moments d’oppression très-pénible ; je ne puis marcher sans me fatiguer et sans étouffer ; enfin, je suis toujours très-patraque et misérable. J’ai eu, de plus, des tracas très-graves : P…, que j’avais emmenée avec moi, est devenue tout à coup si maussade et si impertinente, que j’ai du la renvoyer ; vous sentez que perdre une femme qui est depuis quarante ans chez moi n’est pas chose agréable. Heureusement, le repentir est venu ; elle a demandé pardon avec tant d’instances, que j’ai eu un assez bon prétexte pour céder et la conserver. Il est si difficile aujourd’hui de trouver des domestiques sûrs, et P… a tant de qualités, qu’il m’aurait été impossible de la remplacer. J’espère que la colère et la fermeté dont j’ai fait preuve et dont, entre vous et moi, je ne me croyais guère capable, auront un effet salutaire pour l’avenir et empêcheront le retour de semblables incidents.