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CCLXXXVI

Cannes, 2 janvier 1866.

Chère amie, je ne savais où vous écrire, voilà pourquoi je ne vous ai pas écrit. Vous menez une vie si vagabonde, qu’on ne sait où vous prendre. J’ai bien regretté de ne pas vous attraper entre Paris et ***, qui sont vos deux antres ordinaires. Vous avez pris l’habitude de vous subalterniser, comme disaient les saint-simoniens dans ma jeunesse. Vous êtes tantôt la victime des veaux marins de ***, tantôt et plus souvent la victime de cette enfant que vous aimez, en sorte qu’il n’y a plus moyen de vous avoir comme dans le bon temps d’autrefois, où l’on était si heureux de se promener en votre compagnie. Vous en souvenez-vous ? Je suis venu ici en assez mauvais état de santé, après une semaine passée à Compiègne en pantalon collant, avec toute la résignation possible. On a essayé de me retenir avec la pièce de M. de Massa, mais j’ai résisté héroïquement, et me suis