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Angleterre. Outre quelques courses assez agréables, j’ai fait, pour le Journal des Savants, cet article sur la Vie de Jules César dont je vous ai parlé déjà. Comme c’est la compagnie en corps qui m’avait imposé la tâche, il a fallu s’exécuter. Vous savez tout le bien que je pense de l’auteur et même de son livre ; mais vous comprenez les difficultés de la chose, pour qui ne voudrait pas passer pour courtisan, ni dire des choses inconvenantes. J’espère m’être tiré d’affaire assez bien. J’ai pris pour texte que la République avait fait son temps et que le peuple romain s’en allait à tous les diables si César ne l’eût tiré d’affaire. Comme la thèse est vraie et facile à soutenir, j’ai écrit des variations sur cet air. Je vous en garderai une épreuve. Les mœurs sont toujours en progrès. Un fils du prince de C… vient de mourir à Rome. Il avait un frère et des sœurs pas riches. Lui était ecclésiastique, monsignor, et avait deux cent mille livres de rente. Il a laissé le tout à un petit abbé de secrétaire qu’il avait… C’est absolument comme si Nicomède avait légué son royaume à César. Je gage que vous ne comprenez pas du tout.

Moi aussi, j’avais envie de faire un voyage en