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beaucoup plus belles que celles qui entourent le Righi. Ajoutez à cela qu’il n’y a pas d’Anglais pour vous ennuyer de leurs figures, et qu’on est dans la solitude la plus complète, ayant, ce qui est un grand point, la certitude qu’en trois heures de marche, on aura à Salzbourg un bon dîner. Hier, je suis allé dans la Zitterthal. C’est une belle vallée, fermée à l’un de ses bouts par un grand glacier. Les montagnes à droite et à gauche sont bien découpées, mais c’est toujours le même inconvénient qu’en Suisse : pas de premier plan, pas de moyen de découvrir la hauteur réelle des objets qui vous entourent. C’est dans la Zitterthal, dit-on, que sont les plus belles femmes du Tyrol. J’en ai vu beaucoup de fort jolies, en effet, mais trop bien nourries. Les jambes, qu’elles montrent jusqu’à la jarretière (ce n’est pas aussi haut que vous pourriez le croire), sont d’une grosseur ébouriffante. Pendant que je dînais à Fügen, notre hôte est entré avec sa fille, faite comme un tonneau de Bourgogne, son fils, une guitare, et deux garçons d’écurie. Tout ce monde a insidulu d’une façon merveilleuse. Le tonneau, qui n’a que vingt-deux ans, a un contralto