Page:Mérimée, Lettres à une inconnue 2,1874.djvu/245

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Vous m’écrivez si laconiquement, que vous ne répondez jamais à mes questions. Vous avez une manière à vous de ne faire que vos caprices, qui me confond toujours ; vous plaisantez, vous promettez ; quand je lis vos lettres, je crois vous entendre parler : je suis désarmé, mais furieux au fond. Vous ne me dites seulement pas ce que devient cette Charmante enfant qui vous intéresse tant. Faites en sorte, je vous prie, qu’elle ne soit pas sotte comme la plupart des femmes de ce temps-ci. Jamais, je crois, on n’en a vu de pareilles. Vous me direz ce qu’elles sont en province ; si c’est pire qu’à Paris, je ne sais dans quel désert il faudra se fourrer. Nous avons ici mademoiselle ***, qui est un beau brin de fille de cinq pieds quatre pouces, avec toute la gentillesse d’une grisette et un mélange de manières aisées et de timidité honnête, quelquefois très-amusant. On paraissait craindre que la seconde partie d’une charade ne répondît pas au commencement (commencement dont j’étais l’auteur) :

— Cela ira bien, dit-elle ; nous montrerons nos jambes dans le ballet et cela leur tiendra lieu de tout.