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on n’a le temps de rien faire et les jours passent avec une rapidité prodigieuse sans qu’on sache comment. La grande et principale occupation, c’est de boire, manger et dormir. Je réussis aux deux premières, mais très-mal à la dernière. C’est une très-mauvaise préparation au sommeil que de passer trois ou quatre heures, en pantalon collant, à ramer sur le lac et à gagner des toux terribles. Nous avons ici quantité de monde assez bien assorti, ce me semble, beaucoup moins officiel que d’ordinaire ; ce qui ne nuit pas à l’entente cordiale entre les invités. On fait de temps en temps des promenades à pied dans le bois, après avoir dîné sur l’herbe comme les bonnetiers de la rue Saint-Denis.

Avant-hier, on a apporté ici quelques très-grandes caisses de la part de Sa Majesté Tu-Duc, empereur de Cochinchine. On les a ouvertes dans une des cours. Dans les grandes caisses, il y en avait de plus petites peintes en rouge et or et couvertes de cancrelats. On a ouvert la première, qui contenait deux dents d’éléphant fort jaunes et deux cornes de rhinocéros, plus un paquet de cannelle moisie. Il sortait de tout cela des odeurs