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aussi longs que celui que vous avez lu, et aussi abondants en empalements, écorchements d’hommes et autres facéties. Je crains que cela ne ressemble trop à Salammbô. Vous m’en direz votre avis candidement, si vous trouvez ce rare Journal des Savants que les ignorants s’obstinent à ne pas lire, malgré tout son mérite.

Nous avons eu dans notre voisinage une tragédie. Une jolie demoiselle anglaise s’est brûlée au bal. Sa mère, en voulant la sauver, s’est brûlée aussi. Toutes les deux sont mortes au bout de trois à quatre jours. Le mari, qui a été brûlé aussi, est encore malade. Voilà la dix-huitième femme de ma connaissance à qui cela arrive. Pourquoi portez-vous de la crinoline ? Vous devriez donner l’exemple. Il suffit de tourner devant la cheminée ou de se regarder dans une glace (il y en a toujours au-dessus de la cheminée) pour être rôtie toute vive. Il est vrai qu’on ne meurt qu’une fois, et qu’on est toujours bien aise de montrer une croupe monstrueuse, comme si on trompait quelqu’un avec un ballon plein d’air ! Pourquoi n’avez-vous pas une toile métallique devant votre cheminée ? Il paraît qu’on devient de plus en plus