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et une encore plus plaisante de ses admirateurs, les bourgeois, qui veulent parler des choses avec les honnêtes gens. Ce sont ces bourgeois que mon ami Augier a fort bien drapés ; aussi m’assure-t-on que personne qui se respecte n’avoue qu’il a été voir le Fils de Giboyer. Avec tout cela, la caisse du théâtre se remplit et la bourse de l’auteur. Je vous recommande, dans la Revue des Deux Mondes du 15, un roman de M. de Tourguenief, dont j’attends ici les épreuves, et que j’ai lu en russe. Cela s’appelle les Pères et les Enfants. C’est le contraste de la génération qui s’en va et de celle qui arrive. Il y a un héros, le représentant de la nouvelle génération, lequel est socialiste, matérialiste et réaliste, mais cependant homme d’esprit et intéressant. C’est un caractère très-original qui vous plaira, j’espère. Ce roman a produit une grande sensation en Russie et on a beaucoup crié contre l’auteur, qu’on accuse d’impiété et d’immoralité. C’est, à mon avis, un assez bon signe de succès lorsqu’un ouvrage excite ainsi le déchaînement du public. Je crois que je vous ferai lire encore la seconde partie de Chmielniçki, dont j’ai corrigé les épreuves pendant que j’étais sur