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à quoi Gorstchakoff répond : « Vous avez onze millions de Hongrois, et vous êtes trois millions d’Allemands. Nous sommes quarante millions de Russes, et nous n’avons besoin de personne pour mettre à la raison six millions de Polonais. Par conséquent, point d’assurance mutuelle. » Il me semble que, du côté de l’Angleterre, il y a apaisement, et il serait possible, probable même, qu’elle nous fît quelques avances pour suivre une même politique à l’égard de l’Italie. Si cela arrivait, je pense qu’une guerre serait impossible, à moins toutefois que Garibaldi ne s’en prît à la Vénétie ; mais les Italiens sont plus prudents qu’on ne croit. On m’écrit de Naples que le gâchis y est à son comble, et que l’on y attend les Piémontais avec la même impatience que nous avions, en 1848, de voir arriver à Paris les troupes de ligne. C’est après l’ordre qu’on soupire et on ne le voit qu’avec Victor-Emmanuel. Garibaldi et Alexandre Dumas ont, d’ailleurs, fort bien préparé les esprits, de même qu’une pluie glacée prépare à un dîner chaud. Adieu, chère amie ; je pense me mettre bientôt en route pour Cannes. À Marseille, où je serai vers le milieu de novembre,