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tout au moins de résignation ; car je suis le plus mauvais malade du monde, et je fais la mine à mes meilleurs amis. Quand je suis étendu sur mon canapé, je pense avec plaisir à vous, à notre mystérieuse connaissance, et il me semble que je serais bien heureux de causer avec vous autant à bâtons rompus que je vous écris ; et encore songez qu’il y a cet avantage que les paroles volent et que les écrits restent.

Au surplus, ce n’est pas l’idée d’être un jour imprimé tout vif ou posthume qui me tourmente. Adieu ; plaignez-moi. Je voudrais avoir le courage de vous dire mille choses qui me rendent cette vie triste. Mais comment vous les dire de si loin ? Quand donc viendrez-vous ? Adieu encore une fois. Vous voyez que, si le cœur vous en dit, vous avez tout le temps de m’écrire.


P.-S. — 26 septembre. — Je suis encore plus triste qu’hier. Je souffre horriblement. Mais, si vous n’avez jamais éprouvé par vous-même ce que c’est qu’une gastrite, vous ne comprendrez pas ce que c’est qu’une douleur vague qui est très-vive pourtant. Elle a cela de particulier