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plaisait ; comme ils ont peur de le gâter, ils y mettent des housses de toile qu’ils n’ôteront que lorsque le meuble sera usé. Dans tout ce que vous dites et tout ce que vous faites, vous substituez toujours à un sentiment réel un convenu. C’est peut-être une convenance. La question est de savoir ce que c’est pour vous auprès d’autre chose qu’il serait presque bête et ridicule de lui comparer dans ma manière de voir. Vous savez que, bien que je n’aie pas beaucoup d’admiration pour les mauvais raisonnements, je respecte les convictions, même celles qui me paraissent les plus absurdes. Il y a en vous beaucoup d’idées saugrenues, pardonnez-moi le mot, que je me reprocherais de chercher à vous ôter, puisque vous y tenez et parce que vous n’avez rien à mettre en place. Mais nous rêvons. N’y a-t-il pas l’appareil de cal y canto qui nous réveille sans cesse ? Devons-nous chercher encore à fermer la crevasse par laquelle nous voyons des choses de féerie ? Que craignez-vous ? Il y a dans votre lettre d’aujourd’hui, au milieu d’un tas de duretés et de sombres pensées bien froides, quelque chose qui est vrai. « Je crois que je ne vous ai jamais tant