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NOTES


Sur Bonnot. — D’aspect, Bonnot passe inaperçu. Sa figure est quelconque. Il faut l’étudier, lui parler en face, le connaître enfin à fond, pour remarquer la vivacité de ses yeux gris, petits et perçants, l’énergie de ses traits, la brièveté et la netteté de sa parole. Il parle assez bas. Il a un poumon malade. Au premier abord, il semble plutôt un « petit vieux bien propre » qu’un illégal. Il a du reste toujours, avec lui, une petite sacoche en cuir qu’il tient à la main, jamais gantée ; dans cette sacoche, il enferme, brosses diverses et nécessaire de toilette : il ne paraît jamais sale en public, même après un travail salissant. Brosses, savon, serviettes, cols et manchettes de rechange lui donnent un air paisible. En un mot un artiste ès crimes, comme on a dit.

Intellectuellement, peu de connaissances. Primaire, il ne s’est jamais perfectionné. Manque absolu de culture. Peu enclin aux idées, réfractaire à tout travail cérébral. Moralement, correct avec ses pairs qu’il traite en égaux. Il n’a pas d’amis. Il n’a que des camarades d’occasion, surtout parmi les anarchistes, assez enclins à la camaraderie. Techniquement, un mécanicien hors pair, chauffeur d’auto exceptionnel, voleur adroit, expérimenté. Il a cependant une supériorité sur Garnier. Il est adversaire de l’assassinat.

Cela semblera étrange. C’est pourtant ainsi. Il ne consent au meurtre qu’en dernier ressort. Il aime les travaux faits en artiste, sans traces, sans effusion de sang, sans effraction ou, alors, avec le minimum. On verra que ce portrait est juste en étudiant ses affaires dans les journaux de l’époque.