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correspond plus à rien de réel ? Qu’il me suffise d’indiquer qu’on comptait alors, en France, comme ailleurs, comme dans tous les pays dits civilisés, des masses multiples d’individus qui écoutaient et suivaient un homme, se pressaient derrière un drapeau, se réclamaient d’un ensemble d’idées, s’efforçaient de faire prévaloir leurs méthodes de gouvernement. Les uns rêvaient de détruire l’ordre social de fond en comble, avec son armée, sa police, ses tribunaux, ses administrations, ses multiples rouages. D’autres estimaient que tout était pour le mieux dans la meilleure des sociétés et défendaient l’ordre en même temps que leur porte-monnaie. Ces clans ou partis politiques se divisaient en groupements divers : les uns catholiques, les autres laïques ; les uns pacifistes, les autres belliqueux… Mais, par dessus tous ces partis, groupes, organisations, ligues, pullulant à travers le pays, on voyait s’élever, aux heures troubles, comme l’écume sur la mer houleuse, des cohortes d’illuminés qui se baptisaient eux-mêmes « nationalistes ». Leur programme tenait en un seul mot : La Guerre. Leur cri de ralliement : « Vive l’armée. » D’un bout de l’année à l’autre, ils déclamaient furieusement contre un ennemi qui n’était jamais tout à fait le même ni tout à fait un autre et apparaissait toujours menaçant. La haine et la gesticulation leur tenaient lieu de convictions et quand ils avaient fini de hurler : « Mort à l’Allemagne ! », c’était pour reprendre aussitôt : « Mort aux Anglais ! »

Les articles alarmants des journaux, l’agitation fébrile qui s’emparait du peuple, l’anxiété générale devenaient autant de prétextes à l’entrée en scène de ces