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— Eh là ! vous autres… Savez-vous ce qu’on vient de m’apprendre ?… La Banque des Pays Neufs… cambriolée… Trois millions évaporés, envolés, évanouis… Pffut !… Un trou dans le mur… Un veilleur endormi…

Tumulte dans la salle. Gloussements, glapissements, meuglements… Ça c’est un peu fort !… Mais c’est la troisième fois… Inouï !… Fabuleux !… Fantastique !… Nestor Coquet, vieux pamphlétaire endurci, blanchi sous les injures, fit deux pas dans ma direction et, de sa voix grave, formula :

— Quel beau papier on aurait fait avec ça… autrefois.

Il disait vrai, l’ancêtre… Quand je débutai dans la presse, on écrivait encore. On trouvait, dans les publiques feuilles, des chroniques, des échos, des « variétés », de petits articulets. On alimentait diverses rubriques. On signait ses productions hâtives, souvent marquées au coin d’une verve intarissable et, à force de signer, on se constituait une personnalité importante, on se hissait sur la crête de la notoriété, on devenait un « as » de la profession. Aujourd’hui tout est chahuté. Les journaux se sont transformés en usines et les plumitifs en servants de la machine à imprimer… Mais je n’avais pas le loisir de philosopher sur l’évolution des mœurs et la bassesse des hommes. Le rédacteur en chef — le Maître investi d’un formidable pouvoir — venait d’apparaître, sourcils froncés, regard sévère :

— Que se passe-t-il ?

— Une communication. On a cambriolé la Banque des Pays Neufs, par les mêmes procédés que pour le