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c’est qu’il peut y venir, naturellement, sans effort, par des moyens que nous savons, nous tous qui appartenons au Grand Cercle.

Les ondes d’énergie distributrice m’envoient son image et véhiculent ses paroles. J’ai laissé en action mon cinéphone, ce qui lui a permis d’entrer chez moi sans prévenir pendant qu’à mon insu ma propre image, bondissant dans l’espace, pénétrait dans cette salle lointaine que je connais si bien et où il s’acharne à de surhumains labeurs.

Nous sommes face à face. Il vient de prononcer un mot qui m’a bouleversé. J’interroge :

— Que voulez-vous dire ?

Néer hoche la tête.

— Voyez-vous, fait-il, il y a du flottement dans le Grand Cercle. Il semble que la confiance diminue et qu’Ugolin faiblisse. Moi-même, l’animateur, comme vous aimez à me qualifier, il m’arrive de douter et de me pencher sur mon âme pour écouter je ne sais quel obscur avertissement.

Une ombre voltige sur son front et son regard qui paraît chercher dans le lointain se voile de tristesse.

— Comprenez-moi bien, poursuit-il, il n’est point absolument prouvé que nous soyons à l’abri de la déchéance. Longévité n’est pas immortalité. Notre grossière enveloppe s’use lentement et j’ai peur, m’entendez-vous, j’ai peur de la catastrophe brutale qui peut s’abattre sur nous, à l’heure où nous y songerons le moins.

— J’ai déjà médité là-dessus, dis-je. Mais pourtant… Chaque expérience ne nous procure-t-elle pas un surcroît de vigueur…