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versaire, nous verrions bien. Je n’étais pas homme à céder à des menaces.

Et j’écrivis le papier qui devait me réhabiliter, imposer silence aux imbéciles. J’y contais le double enlèvement de deux jeunes gens, dont un soldat, et je demandais ironiquement en terminant : « Sont-ce maintenant les curés qui mangent les mécréants ? » Ce trait eut une fortune inespérée. On le répéta d’un bout de Paris à l’autre. Et ce fut suffisant pour déterminer, dans l’opinion, le revirement que j’escomptais.

Bientôt d’autres disparitions vinrent s’ajouter aux anciennes. Il y eut, quelquefois, maldonne. Certains des disparus se firent pincer en charmante et galante compagnie. Mais l’anxiété générale ne fut pas diminuée par ces intermèdes. Que de folles hypothèses prirent alors leur vol. Tantôt, on lançait de nouveau l’idée d’une Messaline insatiable, ou bien l’on évoquait la Tour de Nesle — Marguerite, ces cordes me font mal ; — tantôt, on parlait d’une troupe d’anthropophages. Le Préfet de police fit placarder des avis : « Jeunes gens, méfiez-vous ! ne suivez pas aveuglément la première aventurière de rencontre ! » Car chacun s’était mis dans l’esprit que l’auteur de ces rapts inexpliqués employait un bataillon de jupons pour attirer les téméraires. Et, toujours, la même question sur toutes les lèvres, dans toutes les feuilles : « Qu’en fait-il ? » IL, le Minotaure, l’Être de mystère, le Savant de proie, l’X… du problème. Les tuait-il, ces jeunes gens ? Les dévorait-il ? S’abreuvait-il de leur sang ? Toutes les stupidités des mois précé-