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panneau. Après avoir conservé quelques semaines les militants ouvriers dans les barreaux, il les fit remettre en liberté et l’amnistie fut votée.

Mes cinq années de prison furent effacées.

Il me restait les autres. Je dus les achever.

Cependant, je bénéficiai de quelques jours de liberté. Voici comment. Clemenceau tombé, Briand prit le pouvoir et l’on parla tout de suite d’apaisement. Le fait est qu’il y eut une certaine détente. Le « malfaiteur public », disparu, on respira plus à l’aise.

Vers la fin août 1909, le directeur de la prison nous fit appeler et nous dit :

— Messieurs, le gouvernement est décidé à vous accorder la libération conditionnelle. Il ne vous reste qu’à donner votre signature.

Et, du doigt, il désignait quelques paperasses.

— Mais, dit Almereyda, nous n’avons rien réclamé.

— C’est exact. Mais vous pouvez signer votre demande. Ca n’a aucune importance. Simple formalité.

Nous nous consultâmes, rapidement, du regard, et Almereyda reprit la parole.

— Nous ne signerons pas.

— Comment ! Vous refusez la liberté ?

— Pas du tout. Mais nous ne voulons rien demander et, surtout, rien devoir au gouvernement.

Le directeur insista. Peine perdue. Mais, quelques jours après, il revint à la charge. Nouveaux refus. Une troisième fois, il nous fit appeler. Nous le suppliâmes de nous laisser en paix.

Alors, il se produisit ceci. Ne pouvant venir à bout de ces singuliers prisonniers qui se refusaient obstinément