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d’entendre proférer de telles injures. Ne pourriez-vous faire comprendre à vos compagnons ?…

Je levais les bras, dans un geste d’impuissance.

Comme on voit, c’était charmant. Des jeux, excellente table, chansons… Il m’arrive d’y rêver, de loin en loin, et le souvenir de cette confraternité avec nos pires ennemis éteint en moi toute haine et toute rancune. Nous trinquions alors ensemble. Nous devions nous injurier et nous battre plus tard. Je pense, même, que ce n’est pas fini. Mais je rigole quand un quidam m’interpelle aujourd’hui :

— Tout de même, monsieur, quand un homme a payé de sa personne et sacrifié des années de sa vie ! Ah ! la prison ! ce doit être terrible ! Dire que vous êtes allé en prison !

Oui, je rigole. D’abord parce que j’ai connu plus tard les délices de la guerre. Et puis, il faut y avoir passé, par la prison (politique), pour savoir ce que c’est, je veux dire rien… Cependant, pour demeurer véridique, je suis obligé de reconnaître qu’il nous manquait, oh ! pas grand-chose, ce petit, tout petit avantage que possédaient sur nous les gens du dehors et qu’on n’apprécie vraiment qu’au dedans : la liberté.


J’ai indiqué déjà, que ces messieurs les royalistes rêvaient d’accaparer les énergies révolutionnaires au profit de l’« Affectionné », héritier de tant de grands rois qui firent, paraît-il, la France.

Pour cela, ils s’occupaient de conquérir quelques-uns de nos compagnons par des prévenances et des gentillesses de toutes sortes. Or, parmi ces ouvriers