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sont exacts) était un homme barbu et charmant. Je me souviens qu’un jour il me fit appeler et me dit :

— Vous continuez à collaborer à diverses feuilles révolutionnaires et vous signez de nos initiales : V. M. Or sachez qu’on s’est ému en haut lieu. Il est question de supprimer visites et visiteurs. Car on se doute bien que ce sont les visiteurs qui se chargent de faire parvenir votre copie. Ne pourriez-vous adopter un pseudonyme ? Pour vous comme pour moi, cela vaudrait bien mieux.

Je remerciai et promis de tenir compte de cet avis. Quelques jours après, mes articles étaient signés : Vehem.

Le directeur écouta notre requête et s’engagea à faire le nécessaire. Peu de temps après, le gardien-chef nous dit :

— Messieurs, une bonne nouvelle. La parloir va être transféré au réfectoire.

Ce réfectoire était une grande salle rectangulaire située à l’extrémité d’un long couloir dominé par une voûte vitrée qui séparait deux rangées de cellules. Il donnait, à sa gauche, sur une petite cour qu’entouraient des murs grisâtres et féroces et que nous avions pu à peine entrevoir par les carreaux brouillés de la porte. Mais, telle qu’elle était, cette cour excitait nos convoitises. Elle promettait un peu d’air, quelques rayons de soleil.

Il faut que je vous confie, en passant, que dans les couloirs de la Santé, traîne une odeur indéfinissable, des relents de graillon, de lessive et de sueur qui