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 Je posai ma valise dans un coin et je m’exclamai :
— Boum ! Ça y est. En voilà pour un an.

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* *

J’étais venu me constituer prisonnier, parce que les autorités m’y avaient invité aimablement, mais formellement, et qu’à moins de franchir les frontières, il m’était difficile d’agir autrement.

J’avais, deux ou trois mois avant, à la Cour d’assises de la Seine, sous la présidence de M. Puget, et avec un certain Boulloche — ô Courteline ! — au fauteuil du ministère public, récolté une année de prison pour le crime « d’injures et outrages envers les armées de terre et de mer ». C’était le bon temps. On pouvait taper furieusement sur notre admirable armée, dénoncer les « galonnés », les bombarder d’une prose vengeresse. Au bout, c’était la Cour d’assises avec possibilité de se défendre et, quelquefois, rarement, l’acquittement.

Aujourd’hui, c’est la correctionnelle, les lois scélérates mises en vigueur, l’inculpation d’excitation au meurtre et à la guerre civile, la condamnation certaine et irrémédiable. Ainsi le veut le progrès.

Je puis dire que ce fut un superbe procès. Nous étions deux accusés, le grand artiste Aristide Delannoy et moi-même. Nous avions, en complicité, publié un numéro des Hommes du Jour consacré au général d’Amade et aux prouesses de nos vaillants soldats au Maroc.

Delannoy — que la mort nous a enlevé prématurément —