avait confié son courroux à mon père, qui comptait parmi ses meilleurs amis et collaborateurs. Mais quelques années après, je me trouvai nez à nez avec l’irascible poète. C’était vers 1912, à Marseille, sur la Cannebière, pour être exact. Je rédigeais en chef un quotidien socialiste : la Provence, et nous étions en pleine période d’élections sénatoriales. Pelletan était furieux parce que son siège venait d’être discuté et que les socialistes le combattaient. Il m’eng… uirlanda sans le moindre ménagement.
— Alors, tu fais campagne contre moi, maintenant… Alors tu me préfères quelques crétins qui s’intitulent socialistes. Des socialistes, ça !… Qu’est-ce qui m’a fichu des socialistes semblables !
Il continua longtemps sur ce ton. Et déjà, un rassemblement se formait autour de nous. Bien qu’à Marseille, on ait assez l’habitude du bruit, j’aurais voulu me trouver sous terre. Je balbutiais, cherchant à m’expliquer. Mais le redoutable Camille ne m’en laissait pas le temps.
— Des cochons… tous des cochons… Vous me paierez ça…
Et, brusquement, il explosa. Et je vis alors qu’il avait toujours sur le cœur le mauvais tour que je lui avais joué en publiant son poème. Car il me lança dans la figure.
— Tes socialistes, tiens ! ils ne sont même pas républicains… C’est exactement comme ces vers idiots que tu m’as mis sur le dos, galopin !…
Voilà l’histoire. Aujourd’hui on exhume ce fameux poème. Et l’on se demande : Est-il oui ou non de