partie, dans votre jeunesse, de groupes littéraires. Rappelez-vous. Un chroniqueur du Petit Journal, le nommé Cochinat, vous avait baptisés : « Les Vilains Bonshommes… »
— Je me souviens, en effet. « Les Vilains Bonshommes » se réunissaient chez Gustave Pradels, à l’hôtel Camoëns, rue Cassette. Il y avait là Richepin, Verlaine, Bouchor, Jean Aicard, d’Hervilly. Blémont, Cros, André Gill, Valade, Rollinat, d’autres encore… Tu n’as qu’à revoir, d’ailleurs, le tableau de Fantin-Latour : Le Coin de Table. Nous sommes là quelques-uns réunis sur la toile. Mais cela ne prouve pas que ces vers soient de moi.
— Voyons, Monsieur Pelletan, ils sont très bien ces vers…
— Ce n’est pas mon avis. Et veux-tu que je te dise, ça doit être un mauvais tour de Jean Aicard. Chaque fois que Jean Aicard faisait de mauvais vers, il me les attribuait.
— Mais puisqu’ils sont excellents.
— Ils sont tout de même de Jean Aicard. Et il ne l’a pas fait exprès.
J’insistai vainement. Camille Pelletan, de plus en plus furieux, finit par m’interdire formellement de publier le poème. Il alla même jusqu’à me menacer de je ne sais plus quelles brutalités. Puis, se calmant :
— Tiens, renonce à tes bêtises. Je vais t’en donner d’autres des vers, et du Verlaine, de l’inédit… Attends.
Il se recueillit un instant :
— Voici ce que Verlaine a laissé, certain soir, sur l’album des « Vilains Bonshommes ». Ça date