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général pour le Midi. Seulement, ce métier, que j’ai exercé provisoirement (parmi tant d’autres), ne me plaisait qu’à moitié. Je n’arrivais jamais à l’heure le matin (la nuit m’ayant un peu fatigué). Je dormais sur les paperasses. D’autres fois, je me faisais porter malade, comme au régiment. Et je me souviens qu’un matin, le brave Escartefigue vint me réveiller dans la petite chambre d’hôtel que j’occupais rue Grégoire-de-Tours :

— Allons ! ne fais pas le fada. Voilà huit jours qu’on ne t’a vu à la maison.

Il réussit à me convaincre. Il m’emmena presque de force et c’est ainsi que je lui dus de n’être jeté à la porte que… trois semaines après. Cela se passait quelques jours avant les élections municipales de Toulon. Escartefigue me chuchotait :

— Si seulement je pouvais être adjoint au maire… je serai tranquille.

Il fut mieux qu’adjoint. Arrivé en tête de la liste, on en fit le premier magistrat de la ville. Je note encore ce détail. Le samedi qui précéda son triomphe, il prit le train, à l’aide d’un permis, et, sortant du café de Rohan, au Palais-Royal, où nous venions de quitter mon père et Maurice Allard, nous grimpâmes, tous deux, sur l’impériale d’un omnibus, Escartefigue se pencha vers moi et murmura :

— Je ne paye que ma place… J’ai juste ce qu’il me faut pour retourner.

Pauvre, mais honnête. Quelques mois après, il était riche. Comment l’est-il devenu ? Il a eu quelques démêlés avec la justice. Mais chut ! La ville de Toulon