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J’avoue que, moi-même, rebelle à toute discipline et n’ayant pas l’esprit de parti, je me séparai du général.

Une vaste armée antimilitariste à opposer à l’autre ! C’était peut-être logique. Ça ne me disait rien. Malgré tout, je m’obstinais à défendre Hervé. Dans les Hommes du Jour, — c’était en septembre 1911, — j’affirmais qu’en dépit de ses changements de tactique, « Hervé avait conquis tous les droits à la plus large et à la plus inaltérable confiance ».

Je ne puis relire ces lignes, aujourd’hui, sans faire un peu la grimace.

Mais ce qu’il importe de marquer, c’est que l’homme de l’antipatriotisme, cédant à ses instincts militaristes, rêvait de devenir général pour tout de bon et de faire régner la discipline dans une armée de révoltés. En même temps, il conseillait l’entrée à la caserne, la conquête des galons ; défendait les retraites ouvrières — les retraites pour les morts, disait-on — qu’il avait violemment combattues quelques années avant ; s’efforçait de réunir, en un faisceau solide, toutes les tendances des partis d’avant-garde, mariant ainsi la carpe et le lapin. Et il lançait un mot d’ordre retentissant : « Le désarmement des haines ».

Après une nouvelle condamnation pour avoir injurié ceux qu’il appelait les « Cosaques de la République », Hervé résolut, dès sa sortie de prison, de prendre contact avec les foules, pour exposer ses nouvelles méthodes. Mais il voyait se dresser contre lui, outre l’élément libertaire, les révolutionnaires syndicalistes de la vieille C. G. T. Il allait au-devant