Page:Méric - À travers la jungle politique littéraire, 1930.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De retour à Paris, Marcel Deschamps reparut naturellement à la Chope. Puis le temps fila. La guerre vint. On me dit que Deschamps était enrôlé parmi les zouaves. Il a dû coûter cher à la patrie, en drap militaire. Mais il avait eu des aventures. Il s’était évadé de Lille. La guerre terminée, il retourna dans Ie Nord, fonda des journaux, fut poursuivi, condamné. Il eut, notamment, une polémique violente avec le général Percin qu’il chargeait de tous les crimes, à la suite d’un volume qu’il publia sur l’abandon de Lille. Entre temps, il s’était marié avec la fille de Jacquet, le militant socialiste fusillé par les Allemands. Une des dernières fois que je le rencontrai, à Paris, il venait défendre l’ancien préfet du Nord, Trépont, qui fut longtemps prisonnier en Allemagne et qui était alors en butte à la rancune canaille de Jeroboam Mandel[1].

*
* *

À côté de Marcel Deschamps, une des gloires de la Chope, était le père Escat, candidat plusieurs fois malheureux à toutes sortes d’élections législatives ou municipales. C’était un vieux petit brave homme, primaire et ignorant à souhait, dont l’accent gascon faisait nos délices. Imaginez une bonne gueule sympathique, une barbe carrée et courte à peine grisonnante, avec des yeux de braise. Il faisait rouler harmonieusement

  1. J’ai publié, à ce sujet, une série d’articles dans l’Œuvre. Très courageusement et libéralement, Gustave Tery m’avait permis de marquer la malfaisance du clemencisme de guerre.