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batailles. J’appartenais alors au parti socialiste unifié — membre de la quatrième section.

La Chope retentissait surtout des éclats de voix des tribuns. Changement de décors. Les diverses tendances du parti avaient leurs représentants. Les insurrectionnels faisaient face aux guesdistes et se chamaillaient avec les jauressistes. On y préparait les congrès et les élections. Plus d’un élève-candidat fut évincé au cours de ces soirées tumultueuses. Mais cette Chope, que tant d’hommes politiques, d’écrivains notoires, d’artistes admirés ont hantée pendant des années et des années, vaut qu’on s’y arrête.


VI

Les hôtes les plus assidus de la Chope de la rue de la Harpe étaient, pour la plupart, des membres du parti socialiste unifié. Ils venaient là, de tous les coins de Paris, voire de province. On savait que c’était une des dernières « boîtes » politiques du quartier. Je pense que presque tous les militants y sont passés, entre 1908 et 1912.

Je pique quelques échantillons, dans le tas. D’abord Marcel Deschamps, un gros garçon amateur de bière, paradoxe vivant qui trouvait le moyen, tout en débarquant des régions du Nord, de battre le record de la pétulance et de la gesticulation et de damer le pion au plus exubérant des naturels de la Cannebière. Il brillait, surtout, par une élocution ultra-rapide et en raison même de cette vélocité oratoire, s’embrouillait