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Cependant, aux heures glorieuses de la Buci, pas un d’entre nous ne songeait à se « ranger » ainsi. On ne voulait pas déchoir. Le « Petit Bar », l’« Habitué », les allées du Luxembourg bornaient notre horizon. Pas d’existence plus prosaïque et plus casanière, au fond. De loin en loin, une excursion sur le Boul’‑Mich et de grandes vadrouilles jusqu’à Montmartre. C’était à peu près tout.

D’ailleurs, qu’aurions-nous réclamé ? Songez que nous avions notre « revue ». Eh ! oui. Cela s’appelait : l’Œuvre d’Art international. Un écrivain italien, Francesco Zeppa, en était le directeur et nous ouvrait ses colonnes. Des douzaines de jeunes écrivains ont collaboré à cette inoubliable revue, parmi lesquels de vigoureux talents. J’ai fait là de la critique littéraire, de la critique dramatique… Nous nous réunissions, deux ou trois fois par mois, chez le directeur Zeppa, rue de la Tombe-Issoire. Toutes les tendances politiques et littéraires se heurtaient et le libertaire que j’étais y coudoyait un jeune homme qu’on appelait Georges Casella.

Casella ! Ce nom ne vous dit rien. Rappelez-vous l’affaire Caillaux, le deuxième bureau. Casella était, en Suisse, au centre des machinations ourdies contre l’ancien président du Conseil. De la littérature à la police. Lorsque, dans le Journal du Peuple, après la guerre, j’entrepris de défendre Caillaux, alors en cellule — et moins confortable que M. Léon Daudet, — je dus secouer et maltraiter mon ancien collaborateur de l’Œuvre d’Art. En échange, il promit quelques paires de gifles à certains « défaitistes »