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bouillie et froide. Pas de vin ; pas de bière ; pas de café. Je n’étais pas tout à fait à la noce. Mais je n’ai pas gardé rancune à ce brave jeune homme, encore que, par la suite, il ait cru devoir me ranger au nombre des « renégats » et des « vendus ».


II


Mais je bavarde, je bavarde… Et je m’aperçois que je ne vous ai rien dit de mon « sujet » — un bien mauvais sujet, entre parenthèses. Je vous entends qui vous écriez :

— Et Bela Kun ?

— Bela Kun ? Patience ! Nous y voilà. Nous allons prendre le train pour Berlin.

Berlin. Ne vous attendez pas à ce que je vous promène à travers les rues et les monuments et que je vous serve des descriptions cent fois ressassées. Je note seulement qu’après un voyage de nuit parfaitement confortable, sans le moindre incident fâcheux, R… et moi débarquions dans une petite gare pavoisée et fleurie. On fêtait avec enthousiasme les électeurs retour de Silésie.

Nous filâmes vers Potsdam et après avoir retenu deux chambres dans les environs, nous nous rendîmes au siège du parti communiste qui occupait tout un immeuble avec de multiples bureaux et tout un régiment d’employés. Les nôtres, à Paris, auraient pu vraiment en prendre de la graine. En attendant la Cité future, on s’installait paisiblement dans la société moderne. Mais cette sécurité et ce calme n’étaient qu’apparents. La révolte, au-dessous, grondait et la catastrophe menaçait.

Le communisme allemand traversait alors une crise très grave. Le premier de ses leaders, Paul Lévy, devenu suspect aux yeux de Moscou, était mis hors du parti. On