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propagande révolutionnaire, à la pointe de l’extrême gauche. Il s’affirmait toujours individualiste. Il se mit à collaborer à un hebdomadaire d’idées et de combat, fort bien fait, ma foi, terriblement vivant, qui s’appelait L’Ennemi du Peuple. Tout un programme.

C’était vers 1905. Georges Darien était à son aise dans cette libre feuille, et sa plume de polémiste déchaîné allait s’en donner à cœur-joie (si l’on peut ainsi dire).

Ses articles, du reste, ne tardèrent pas à faire sensation. Ils étaient d’une véhémence folle, émaillés de calembours et de métaphores échevelées. Darien cultivait volontiers le calembour dont il assommait ses adversaires. Et le paradoxe aussi. Car il débuta en cognant férocement sur les anarchistes et en réclamant, lui, l’antimilitariste, la guerre. Il expliquait que de la guerre seule sortirait la paix définitive, et reprenait à son compte, en lui donnant un sens nouveau, l’antique devise : Si vis pacem, para bellum.

En même temps, Darien entrait dans une organisation que nous venions de mettre laborieusement sur pied : « L’Association Antimilitariste Internationale des Travailleurs » (A. I. A.). Cette organisation avait son siège à Amsterdam. Elle comptait, dans son comité directeur de France, des hommes comme Gustave Hervé, Urbain Gohier, Laurent Tailhade, Miguel Almereyda… Elle fit quelque bruit.

En ce temps-là, Darien qu’on avait connu, sur les boulevards, quelques années avant, maigre, sec comme un coup de trique, était devenu énorme. Le cou épais, le sang au visage, la voix furieuse, il semblait toujours prêt à exploser.

Et il rêvait continuellement de guerre. Au Congrès qui se tint à Amsterdam, par les soins du vieux militant