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Premier gala qui vous rassemble,
Avec Alphonse et Nicolas,
Car vous êtes bien faits, hélas !
Pour trinquer ensemble…


C’était sévère. C’était dur pour ce pauvre homme pusillanime qu’était Armand Fallières. Mais, en ces heures-là (juillet 1910) nous ne respections pas grand’chose et nous ne reculions devant aucune exagération.

Pendant tout le temps que dura la collaboration de Couté à La Guerre Sociale et à La Barricade nous nous quittâmes peu, lui et moi. Parfois je grimpais jusqu’à la rue des Saules, à Montmartre, où je trouvais le poète dans cette salle basse et enfumée du Lapin Agile dont Francis Carco — qui n’était pas encore de ses habitués — a parlé abondamment dans ses souvenirs de bohème.

On y rencontrait, à côté de Couté, des jeunes gens qui devaient acquérir, plus tard, la célébrité. Roland Dorgelès y fréquentait ; il y montait même le fameux bateau du peintre Boronali. Mais, parmi les plus assidus, se trouvaient Pierre Mac Orlan, Max Jacob, le dessinateur Depaquit, futur maire de Montmartre, le peintre Vaillant, le caricaturiste H. P. Gassier, qui débutait. Et tant d’autres ! Le bon Fred, patron du lieu, y roucoulait la romance en pinçant sa guitare, et écoulait sa bibine.

Ah ! ces années perdues de notre belle jeunesse ! On sortait de là, très tard, dans la nuit, et pas toujours bien solides, le cerveau plein de fumée, et l’on poursuivait d’orageuses discussions dans la rue. Mac Orlan rêvait de rivages lointains et de paysages inédits. Quant à Max Jacob… euh !… s’il pensait au bénitier, ce n’était sûrement pas à cause de l’eau.

D’autres fois, Couté, accompagné de son fidèle Depa-