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prononçait contre les retraites ouvrières. Mais socialiste modéré, il se trouvait fort embêté de compter dans les rangs des adversaires. Aussi sa démonstration était-elle fort embrouillée. On le sentait gêné. Il se tournait constamment vers le groupe jauressiste et semblait lui dire : « Vous savez, je ne puis faire autrement. » Alors je me levai et je lui criai :

— Ne vous excusez pas.

Fiancette se retourna, furieux.

— Citoyen Méric, me décocha-t-il, j’ai l’habitude de parler de choses que je me suis donné le soin d’étudier, ce n’est pas comme vous.

Ah ! j’avais réussi un joli tour. Là-dessus Sembat, de son banc, m’acheva :

— Fiancette a raison. Vous auriez mieux fait de vous taire.

Je baissai la tête, penaud. Mais l’intervention de Sembat s’expliquait. Il y avait alors nombre de chauffeurs dans le XVIIIe dont Fiancette était le puissant secrétaire. Sacré Sembat !

Mais puisque je viens de m’arrêter sur ce Congrès de Nîmes, qu’on me permette une parenthèse.

À cette époque, dans les congrès du parti, les tendances se heurtaient violemment. Cela n’empêchait nullement les adversaires de demeurer de parfaits camarades. C’est ainsi que j’ai toujours été l’ami de Renaudel, avec lequel je me suis trouvé, cependant, rarement d’accord et que je tiens pour un véritable, loyal et convaincu socialiste aussi bien que pour un très honnête homme, fidèle à ses amitiés, incapable d’une mesquinerie, quoique puissent en dire certains saligauds qui, pour continuer à jouer leur rôle dans le parti communiste — où les borgnes sont des rois — ont accepté tous les camouflets et toutes les déchéances. De plus, Renaudel est un lutteur opiniâtre.