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a atteint le but marqué, le vouait à la chute. Le despotisme éclairé amenant l’Etat à un certain degré de civilisation se rendait lui-même inutile. L’évolution du peuple a dépassé l’absolutisme. A l’Occident, il était plus facile qu’à l’Orient de passer de l’absolutisme au libéralisme. Si en Europe l’Eglise n’était point séparée de l’État, elle était cependant pour ce dernier un obstacle moindre qu’en Russie. Dans la mesure où Louis XIV et Frédéric le Grand étaient des rois nationaux, où ils ont créé l’idée de l’Etat national soumis uniquement au pouvoir royal, ils s’appuyaient sur la conscience des masses populaires, avançaient de concert avec le peuple et l’histoire, et par conséquent s’opposaient fatalement à toute soumission à l’église ultramontaine. Le gouvernement devenait nécessairement de plus en plus laïque, le catholicisme se retirait de l’Etat. Les aspirations gallicanes de Louis XIV s’appuyaient sur les parlements et la devise de Frédéric le Grand ; « Lasst Jeden nach seinem Façon selig werden » ne se distingue pas essentiellement de celle des social-démocrates contemporains qui proclament que « die Religion ist Privatsache ».

Le libéralisme, héritier légitime de l’absolutisme, a remplacé une forme vieillie de gouvernement par une nouvelle plus parfaite, plus en accord