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l’Eglise orthodoxe aurait pu se convaincre facilement qu’à ce sujet la vérité était du côté du catholicisme. Il s’agissait en réalité de savoir si l’on devait reconnaître comme chef de l’Eglise le pape de Rome ou l’empereur de Byzance. En Occident l’idéal théocratique s’incarne dans le prélat romain qui avait ajouté à son sacerdoce le pouvoir païen du César Dieu. En Orient l’héritier des empereurs romains s’était proclamé souverain pontife de l’église. La chrétienté historique a créé ainsi deux dieux terrestres identiques devant lesquels, les vénérant, elle se prosterna.

Le pape romain et l'oint (χριστὸσ) de Dieu, empereur byzantin, qui se sont emparés du pouvoir du véritable chef de l’Eglise, Christ-Roi, sont tous deux usurpateurs. Il n’y a en ceci aucune distinction métaphysique ; la différence est seulement historique et ses conséquences ont influencé les destinées de l’Occident et de l’Orient.

Soloviev juge l’orthodoxie particulièrement coupable dans cette incapacité de réaliser l’idéal théocratique dans le mécanisme étatique. « L’orthodoxie, dit-il, a séparé la société religieuse de la société laïque. La première se retira dans le monastère laissant le forum aux lois et aux passions païennes. » Rendre l’orthodoxie uniquement responsable de cette contradiction interne est profondément