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qui rejette tout mysticisme comme superstition, ou bien une métaphysique bouddhiste, profonde, mais non chrétienne — absorbtion absolue d’un principe par l’autre, de la Chair par l’Esprit. En ce sens, Tolstoï, quelque étrange que cela paraisse, est plus ecclésiastique que l’Eglise elle-même, plus orthodoxe que l’orthodoxie elle-même, ce qui lui fait perdre une grande partie de sa vérité religieuse.

Tolstoï, n’est-ce pas encore étrange à dire, est un anarchiste, mais non un révolutionnaire. Il nie la révolution comme tout acte extérieur. Rejetant l’Etat, comme principe social faux, il repousse également le principe social vraiment religieux. Rejetant l’Eglise fausse, liée à l’Etat, il repousse, ou plutôt, ne voit pas du tout l’Eglise vraie.

Une fois sorti de l’orthodoxie, Tolstoï tombe dans ce terrible néant que Tchaadaev a fui dans le catholicisme et Gogol en retournant à l’orthodoxie. Tolstoï prit ce vide pour du plein, ce bouddhisme pour du christianisme.

Il est plus fort dans sa négation que dans son affirmation religieuse : ce qu’il faut renverser, il le renverse, mais ce qu’il faut créer, il ne le crée pas. C’est un titan aveugle qui creuse dans les ténèbres souterraines et ne voit pas lui-même quel