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fuir l’Europe, ni l’imiter, mais l’absorber jusqu’au bout. En ce sens Tchaadaev, ainsi que plus tard Herzen, ayant été extrêmement occidental, fut en même temps slavophile à l'envers, c’est-à-dire slavophile révolutionnaire,

En sortant de l’orthodoxie Tchaadaev n’embrassa pas le catholicisme ; il n’y entra pas consciemment, peut-être y tomba-t-il à son insu. Du tsarisme russe à la papauté romaine, c’est comme dit le proverbe russe — tomber du feu dans la flamme.

Mais la dernière vérité sur Tchaadaev fut qu’il ne pouvait pas plus entrer dans le catholicisme que dans l’orthodoxie. Il sortit des deux Eglises — de toutes les limites du christianisme. Lui-même n’osa pas se l’avouer, parce qu’il ne vit pas qu’il y avait quelque chose au delà du christianisme. Pour ne pas rester orphelin, sans église, sans mère, il tendit les mains à une mère étrangère, à une marâtre qui, il le savait bien, ne l’accepterait pas et que lui-même n’accepterait pas.

Un nihilisme infini dans les conceptions historiques, un affranchissement infini, un immense ci terrible désert de volonté et de pensée, voilà lu base de la révolution religieuse chez Tchaadaev et de la révolution politique chez Herzen. Se livrer aux plus grandes audaces, abolir tout dans un