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de sa vie, le battement même de son cœur. Au fond il n’a jamais dit que ces trois mots, mais il les a dits comme personne.

La réalisation du Royaume de Dieu doit avoir lieu non seulement au ciel, mais aussi sur la terre, pendant la vie terrestre de l’humanité, dans la société religieuse, dans l’Eglise, comme Royaume voilà selon Tchaadaev « la dernière prédestination du christianisme ». Pour y parvenir, l’Eglise doit conserver sa liberté vis-à-vis du monde. Or l’Eglise d’Occident a gardé cette liberté, tandis que l’Eglise d’Orient Ta perdue en se soumettant à la puissance séculière, en proclamant le chef de l’Etat, l’autocrate païen — chef de l’Eglise et pontife. Voilà pourquoi l’Eglise libre d’Occident pouvait être l’expression de l’idée, cachée dans le christianisme — non seulement du salut personnel, mais aussi du salut social. De ce principe, dont la papauté comme unité universelle est l’expression, sortit l’unité de toute la civilisation d’Occident, l’unité des peuples européens. Asservie par l’Etat, l’Eglise d’Orient ne pouvait exprimer que l’idée du salut personnel — principe isolant du monachisme. Voilà pourquoi la force active du christianisme resta ici inerte. La Russie ayant reçu le christianisme de Byzance, suivit la même voie que tout le christianisme monastique d’Orient, exclusivement